PISTOLET MANCEAUX VIEILLARD, modèle d'essai 1862, Second Empire.
Longueur de l'arme : 0,340 m
Longueur du canon : 0,200 m
Calibre : 12 mm
Poids : 1,400 kg
Toutes proportions gardées, l'arme se présente de la manière suivante :
Canon : pas d'appareil de visée sur le canon proprement dit. Canon poinçonné « D » sous couronne, « J M » dans un ovale perlé, « O » dans un cercle.
Culasse : beaucoup plus courte que sur les armes longues, ainsi que la portion de canon formant boîte de culasse. Une encoche sur le sommet du levier mobile de manoeuvre sert de cran de hausse.
Platine : modèle 1847 des mousquetons de gendarmerie. Platine signée « Mre Imple de Châtellerault » avec poinçon « P » dans un cercle.
Monture : dans le style classique des pistolets d'arçon français, très forte. Bois marqué « 3 ».
Garnitures : embouchoir-capuche, portant le guidon, relié à la sous-garde "en suite", pontet à bascule et calotte de crosse sans anneau, en laiton. Sous-garde, détente courbe et bride de poignée, en fer.
Baguette : non prévue.
Munition : semblable aux armes précédentes, mais chargée à 1,5 kg de poudre.
Parfait état de conservation.
France.
Second Empire.
NOTE :
Très peu d'exemplaires de ce modèle ont survécu. Dans l'ouvrage de Jean Boudriot " Armes à feu françaises modèles réglementaires", l'auteur présente un pistolet dont le bois porte le chiffre 2. L'exemplaire présenté est le n° 3 .
HISTORIQUE :
En juin 1858, les armuriers parisiens Manceaux et Vieillard déposent un brevet, complétant une invention qu'ils avaient élaborée en 1856, concernant un système de chargement par la culasse pour les armes portatives.
L'infortuné Arcelin vient juste d'être repoussé, la nouvelle arme tombe à point ; l'Empereur, par l'intermédiaire du ministère de la Guerre, commande trois prototypes aux inventeurs. L'expérimentation en est encourageante, au point qu'une série d'armes d'essai est mise en fabrication à la Manufacture de Châtellerault, cette série comportait l'ensemble des types d'armes d'un système adoptable, soit : cinquante fusils d'infanterie, cinquante carabines de chasseur, cinquante mousquetons de cavalerie et vingt-cinq pistolets. Toutes ces armes, prêtes en 1862, durent passer par les ateliers des inventeurs avant la livraison, car le système d'obturation était d'une mise au point très délicate.
Il est certain que Manceaux et Vieillard sont, tout au moins en France, des novateurs en matière d'obturation, ainsi d'ailleurs que Chassepot. Il est difficile d'établir de nos jours à qui revient la primauté, l'idée d'utiliser la force d'expansion des gaz d'une arme afin d'assurer l'étanchéité semblant avoir germé simultanément dans l'esprit des trois inventeurs, qui vont se trouver en concurrence. Si c'est le système Chassepot qui sortira vainqueur pour des raisons pratiques évidentes, le système Manceaux-Vieillard a plus de rigueur technique.
L'obturation est obtenue, ici, par recul, au départ du coup, d'un cône métallique mâle s'engageant dans une partie femelle pratiquée dans la culasse mobile. Grâce à l'élasticité de l'acier, la partie creuse de la culasse mobile s'expanse sous l'influence du cône et, trouvant appui sur la paroi interne de la chambre, elle assure une étanchéité qui se trouve être parfaite si l'arme est rigoureusement usinée, les matériaux soigneusement choisis, bien traités thermiquement et l'arme pas trop fatiguée.
Ce sont ces conditions draconiennes qui seront fatales à ce système d'armes. En effet, si l'usinage en petite quantité par des spécialistes n'offre pas de difficultés majeures, la fabrication en grande série, en manufacture, ne permettait pas le respect des tolérances très étroites, avec l'outillage de l'époque. Au début de la fabrication industrielle de l'acier, le choix de ce matériau était délicat et son traitement thermique aléatoire ; en usage intensif, il se produisait un matage annulaire de la chambre qui compromettait son étanchéité et ne pouvait être réparé que par un passage en atelier, alors qu'avec le système Chassepot, que nous allons voir, un simple échange de rondelle obturatrice, facilement réalisable sur le terrain par l'utilisateur, remettait l'arme en état de tirer.
Sur le plan de la munition, la cartouche combustible Manceaux-Vieillard se montra supérieure à sa rivale Chassepot, cela grâce à son tortillon de laiton qui lui donnait plus de rigidité à l'introduction et entraînait mieux les débris au départ, retardant l'encrassement.
Sur le plan balistique, en plus d'une excellente précision excédant 600 mètres, on obtint une portée vulnérante extrême de 1 800 mètres, énorme pour l'époque, avec une trajectoire relativement très tendue.
En 1863, concurremment avec les armes Chassepot modèle 1862, la série de cent soixante-quinze armes citées fut mise en essai dans les corps suivants :
- 34ème régiment d'infanterie de ligne (Valenciennes) et 63ème régiment d'infanterie de ligne pour les fusils.
- Bataillon des chasseurs à pied de la Garde impériale pour les carabines de chasseur.
- 3ème régiment de hussards (blida) pour les mousquetons de cavalerie.
- 1er régiment de chasseurs d'Afrique pour les pistolets.
Tout en reconnaissant les grandes qualités du système Manceaux-Vieillard, la totalité des corps se prononça en faveur du système Chassepot, pour des raisons d'utilité pratique.
Alors que les expériences continuaient sur le système Chassepot, afin de l'améliorer, le système Manceaux-Vieillard était rejeté, par une décision de la Guerre en novembre 1864. Mais la carrière militaire de cette arme n'était pas finie et, lors des désastres de la guerre de 1870, les inventeurs qui avaient poursuivi avec succès la construction d'un type de carabine civile, en livreront un certain nombre au gouvernement de la défense nationale, ce qui donnera à ce système les honneurs du feu.
Reference :
14803