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Fusil de récompense pour les Troupes à pied Royalistes s’étant distinguées pendant les Campagnes Contre la Révolution, attribué à Jean BOURASSEAU, modèle 1817.

Sold out
Fusil de récompense pour les Troupes à pied Royalistes s’étant distinguées pendant les Campagnes contre la Révolution, attribué à Jean BOURASSEAU, modèle 1817.

Modèle du mousqueton an IX mais avec canon rond allongé, 1,028 m, calibre 17,5 mm, queue de culasse avec décrochement sans décor ni inscription.
Platine du mousqueton modèle an IX gravée « Manuf Royale De Versailles ». Platine transformée à percussion. Toutes les garnitures sont en laiton argenté, sur le modèle des garnitures du fusil an XIII, mais de proportions plus légères (embouchoir, grenadière, capucine, battants). Sous-garde en forme demi-charolaise. Contre-platine forme en “S”. Plaque de couche avec retour terminé par une demi-fleur de lys.
Pièce de pouce en argent massif aux Armes de France avec inscription « Vive le roi ».

Plaque d’attribution sur la joue côté platine gravée « Donné par le ROI au Sr BOURASSEAU (Jean). » (manquent deux clous), plaque en argent massif.

Monture du système an IX, plus fine, léger prolongement de la poignée sur la couche, bois insculpé « JD » et marqué à l'encre sur la crosse « n°94 B ».

Baguette au modèle.
Baïonnette modèle An IX.
Ces fusils, produits à Versailles en 1817, l’ont été à 512 exemplaires.

Bon état de conservation. Les garnitures ont conservé 80% de leur argenture. L'embouchoir n'est pas du modèle, probablement perdu à l'époque il a été remplacé par un embouchoir d'infanterie en acier (oxydation). Le canon est oxydé de manière homogène mais plus profondément au niveau du système de percussion. La platine a une oxydation d'usage mais le marquage est resté parfaitement lisible. Le chien est oxydé. La pièce de pouce et la plaque attributive sont en parfait état, jamais nettoyées. Les vis de la plaque de couche sont oxydées. Le bois est en très bon état, sans coup ni enture.
Ce fusil nous est parvenu tel quel, jamais démonté, jamais nettoyé, à l'exception des pièces indiquées (embouchoir et transformation à percussion). Il provient directement de la famille.

France.

Restauration.

PROVENANCE : familiale.
HISTORIQUE : BOURASSEAU (Jean). Appartenait au 2è corps de l'Armée royale de l'Est, commandé successivement par Messieurs de Sapinaud, puis par le chevalier de Saint Hubert. Ce corps reçu 15 épées, 15 sabres et 50 fusils de récompense. Jean Bourasseau était capitaine, il servit dans la division des Herbiers, commune de Vendée, où il était cultivateur.

Jean Bourasseau a été cité par Madame de la Rochejaquelein pour ses qualités de soldat au sein de l'armée vendéenne. En atteste Le Blog La Maraichine Normande qui présente Les Echaubrognes, paroisse de Jean Bourasseau, et l'action menée par ses habitants à Torfou, déclaré comme l'un des plus brillants faits d'armes de l'armée vendéenne et au cours duquel Jean Bourasseau s'est distingué. On retrouve notamment sur ce blog une enquête faite par les commissaires du département des Deux-Sèvres dans laquelle l'héroïsme de Jean Bourasseau y est mentionné à plusieurs reprises.

source : Blog LA MARAICHINE NORMANDE
http://shenandoahdavis.canalblog.com/archives/2013/02/14/26416474.7

LES ÉCHAUBROGNES - 3ème partie - LA RÉVOLUTION
par l'Abbé Victor Grégoire
… .
Selon le jargon de l'époque, "la horde sacerdotale secouait partout les brandons du fanatisme". On ne voulait pas voir dans la foi si vive et sincère des populations, foi bien justement alarmée par des lois schismatiques qui exigeaient qu'ils se soumissent à des curés apostolats, la seule et véritable cause de l'agitation. Une vingtaine de procédures criminelles et d'enquêtes furent entamées, entre autres celles des Echaubrognes, dont suit la copie extraite des archives nationales.

Enquête faite à Châtillon-sur-Sèvre par les commissaires du Département des Deux-Sèvres.
L'an 1791, et le 3 mars, sur les 11 heures du matin.
Nous Chasteau, président du département des Deux-Sèvres, d'Orfeuille et de Coustis, membre du directoire du dit département en date du 12 février dernier, sommes transportés à la salle ordinaire des séances du directoire du district de Châtillon ; et en conséquence de l'invitation par Nous faite le jour d'hier à MM. les maire, officiers municipaux et procureur de la commune de la paroisse des Echaubrognes, ont comparu MM. Tocqué, Maire, Louis Roy, Vincent Airault, Jacques Coutant, Nicolas Barbot et Louis Noël, tous officiers municipaux de la dite paroisse, ou étant, avons demandé à MM. les officiers municipaux de la dite paroisse quels étaient les motifs qui avaient déterminé plusieurs d'entre eux à donner leurs démissions, sans qu'auparavant il eût été pourvu à leur remplacement. A quoi MM. les officiers municipaux ont répondu : premièrement, M. le Maire a dit qu'il n'avait donné sa démission qu'à cause de son grand âge et de ses infirmités. Les autres officiers municipaux ont répondu qu'ils n'avaient donner leur démission que parce que M. le Maire l'avaient donnée.
Les commissaires ont ensuite demandé aux officiers municipaux, s'ils avaient connaissance d'un arrêté incendiaire qui avait été pris, le 27 janvier dernier, par quarante citoyens de la paroisse. A quoi MM. les officiers municipaux ont dit qu'ils en avaient connaissance que la feuille du registre sur laquelle il avait été inscrit, avait été déchirée et qu'ils avaient signé le dit arrêté. Les officiers municipaux ont ajouté qu'ils avaient reconnu leur faute dès le lendemain, et que c'était la raison qui les avait déterminés à déchirer la feuille sur laquelle il avait été inscrit. Les commissaires ont ensuite demandé aux dits officiers municipaux, s'ils connaissaient les raisons qui avaient empêché le vicaire, procureur de la commune de cette paroisse, à se rendre chez eux. Les officiers municipaux ont répondu qu'ils ne les connaissaient point. Les commissaires ont demandé s'ils avaient connaissance que le sieur vicaire fût monté en chair et eût prêché contre le serment prescrit par l'assemblée nationale ; les officiers municipaux ont répondu qu'ils n'avaient aucune connaissance qu'il eût prêché aucun discours contraire à la constitution civile du clergé.
Les commissaires ont ensuite demandé s'ils avaient connaissance que M. le curé se fût présenté pour exécuter la loi du 26 décembre, et qu'on s'était opposé à ce que M. le curé remplit l'obligation qui lui était prescrite, en lui disant que, s'il prêtait le serment, on lui passerait trois balles au travers du corps. Nicolas Barbot, un des officiers municipaux, a répondu avoir eu connaissance desdites menaces, les autres ont dit qu'ils n'en avaient point entendu parler.
Les commissaires ont ensuite demandé qu'elles étaient les raisons qui avaient empêché jusqu'à ce jour la municipalité de travailler à l'assiette de l'imposition foncière : les officiers municipaux ont répondu qu'ils voulaient attendre pour savoir comment cela se passerait dans la paroisse de Saint-Aubin et autres paroisses. Les commissaires ont demandé aux officiers municipaux s'ils étaient dans l'intention de reprendre leurs fonctions, et de les continuer avec fidélité et exactitude, leur observant que dans tous les cas, ils ne pouvaient les cesser, à peine de responsabilité, jusqu'à ce qu'il ait été pourvu à leur remplacement. A quoi MM. les officiers municipaux ont répondu, à l'exception de M. le Maire a continué de faire valoir ses infirmités, qu'ils reprenaient leurs fonctions, qu'ils promettaient de suite de travailler à l'assiette de la contribution foncière, de nommer des commissaires incessamment, de veiller à l'exécution des lois, de les protéger, et de dénoncer ceux qui voudraient y porter atteinte. Et à l'instant, M. le curé a dit à MM. les officiers municipaux que son intention était de faire son serment civique dimanche prochain, et qu'il les priait de se trouver à la messe de paroisse pour le recevoir, ce que les officiers municipaux ont promis de faire, et d'avertir les notables de s'y trouver, et, attendu qu'il est deux heures, les commissaires ont renvoyé la séance à quatre heures du soir.
Et le dit jour, sur les quatre heures, nous commissaires sus dits, nous sommes rendus au lieu ordinaire des séances du directoire, où se sont trouvés les officiers municipaux dénommés au dit procès-verbal, continuant de prendre des éclaircissements, nous leur avons demandé s'ils avaient connaissance des propos qui se tenaient contre les ecclésiastiques qui avaient prêté le serment, et contre la vente des biens nationaux. Le sieur Nicolas Barbot a répondu en avoir entendu parler plusieurs fois dans les foires et marchés, que plusieurs disaient que, s'ils avaient de l'argent, ils ne le mettraient pas dans ce bien-là, et qu'on n'y avait point de confiance dans les prêtres qui feraient le serment. Lui ayant demandé s'il connaissait quelqu'un de ceux qui avaient tenu ces propos, il a répondu que non.
Les commissaires ont ensuite demandé aux officiers municipaux s'ils avaient entendu tenir de mauvais propos contre les corps administratifs. Le dit sieur a répondu que, dans les foires et marchés, il avait entendu dire que la loi ancienne valait mieux que la nouvelle dans laquelle on ne connaissait rien ; que les districts étaient inutiles et qu'il fallait les détruire ; s'il connaissait quelqu'un de ceux qui avaient tenu ces propos, a répondu que non ; s'il était vrai que les commissaires devant se rendre aux Echaubrognes, il avait été tenu des propos contre eux et s'il les avait entendu menacer ; le même a répondu que plusieurs filles et femmes étaient allées le lundi sur la route d'Echaubrognes à Châtillon pour se trouver à l'arrivée des dits commissaires ; s'il avait connaissance de ce qui s'était passé à Maulévrier, a répondu qu'il s'y était rendu lui-même avec une pique, comme les autres, parce qu'un fusil ratait et qu'une pique ne ratait pas. S'il savait où étaient les canons de Maulévrier, a répondu que non. Les autres officiers municipaux ont répondu qu'ils n'avaient aucune connaissance des faits relatés ci-dessus dans la séance du soir. Ayant ensuite demandé aux officiers municipaux s'ils avaient entendu parler de la coalition qui existait entre plusieurs paroisses de ce district et de celui de Cholet, ils ont répondu qu'ils en avaient connaissance, qu'on s'était même présenté à leur connaissance, qu'on s'était même présenté à leur succursale de Loublande, pour y faire sonner le tocsin, mais qu'ils avaient répondu qu'ils ne le feraient point sans un ordre de leur maire, que le sieur Giraud l'engagea aussi à se rendre à Maulévrier, ce qu'il refusa de faire.
Fait, clos et arrêté le présent procès-verbal au dit lieu, les jour et an que dessus et ont ainsi signé sur l'original :
Tocqué, Roy curé, prem. offic. munic. Nicolas Barbot- Erault-Coutant. Le dit Louis Noël a déclaré ne savoir signer, et qu'il ne signait que quand on lui tenait la main, ne sachant pas lire. - D'Orfeuille, Chasteau président du dép. des Deux-Sèvres, et Coustis, administrateur, conseiller du Directoire du département.
(Arch. nat. DXXIXb, carton 18)

"L'accusation d'excitation à la guerre civile lancée contre les prêtres par la plupart des pièces du temps, ajoute M. Ledain (Histoire de Bressuire, p. 345) est formellement contredite par cette curieuse enquête. Outre les détails inédits sur les premiers troubles, cette pièce officielle contient des révélations d'où il résulte que les paysans étaient beaucoup plus animés que leurs curés contre la Révolution. Ils disaient tout haut, dans les foires et marchés, qu'ils tueraient les prêtres qui feraient le serment, et qu'ils n'avaient plus aucune confiance dans ceux qui avaient accompli cet acte. Il est donc très possible que plusieurs curés de Bocage aient refusé le serment sous la pression irrésistible de leurs paroissiens, plus résolus et plus fermes qu'eux-mêmes dans la défense de l'orthodoxie" Il est permis, ce me semble, de ne pas adopter de tous points cette dernière appréciation de M. Ledain, qui a le tort de conclure du particulier au général.

Si la ruse et la finesse traditionnelles du paysan se trouvent, et à haute dose, dans cette enquête, en effet vraiment curieuse, il faut convenir qu'elle est loin d'être entièrement à l'avantage de nos gens. On est pris de pitié en lisant ces dépositions dont plus d'une sue la peur. Vraiment les femmes et les jeunes filles qui vont fièrement se poster sur la route de Châtillon, pour attendre le passage des commissaires, ont une attitude autrement martiale que ces tristes officiers municipaux qui représentaient si mal notre belle paroisse. Tout cet appareil judiciaire les avait affolés ! ...
Mais heureusement que ceux qui n'étaient pas là pour être témoins des défaillances sans nom de leur pauvre curé et de leurs autres mandataires, vont bientôt montrer l'usage qu'ils sauront faire de ces piques et même de ces fusils qui ne rateront pas toujours entre leurs mains.
M. Roy prêta effectivement, le dimanche qui suivit, le serment à la constitution civile du clergé. MM. les Commissaires députèrent un détachement de ces gardes nationaux mandés pour les seconder dans leur triste besogne. Tous ils firent longuement retentir notre vieille église de leurs bravos, après la lecture faite du serment sacrilège par le malheureux curé, pendant que la population attristée se retirait tout entière, sans lui avoir passé trois balles au travers du corps, il est vrai, mais ayant à tout jamais perdu envers lui cette confiance qu'elle lui avait témoignée jusque-là, depuis la quinzaine d'années qu'il était au milieu d'elle, soit comme vicaire, soit comme curé. Ce n'est, il est vrai, qu'un mois après, le 13 avril 1791, que le Souverain Pontife Pie VI condamna solennellement par un bref cette constitution, comme une usurpation coupable de la puissance temporelle sur le pouvoir spirituel, mais même auparavant, les prêtres bons et éclairés ne s'y étaient point laissés prendre.

M. Robin, vicaire de Saint-Pierre, n'imita point son curé dans cet acte de faiblesse ; aussi, à partir de ce moment, eut-il seul la confiance des habitants qui ne s'adressèrent au curé que lorsqu'il leur fut absolument impossible de faire autrement. M. Roy resta toutefois sur place, les actes de l'état civil, en partie rédigés par lui, en font foi, jusque vers la fin de l'année 1792, pendant qu'à Saint-Hilaire M. F. Tricouëre exerçait également son ministre schismatique. L'un et l'autre, ils président à quelques sépultures ; plusieurs de celles-ci, même sont faites par le conseil municipal, en l'absence des curés, souvent obligés eux aussi de se cacher et de veiller à leur sûreté personnelle. Nos registres deviennent plus incomplets que jamais. La plupart des actes rédigés par une main étrangère sont seulement signés par le prêtre qui a fait la cérémonie. Le 10 octobre 1792, M. Roy date un de ses actes de l'an Ier de la République, et il dit avoir reçu un certificat du sieur Delafargue, citoyen-curé de Saint-Aubin, son voisin. Un jour, ce même M. Roy fait, en présence de deux témoins, le baptême de dix enfants qu'on lui avait apportés de La Tessoualle en l'absence de M. Avril, le curé constitutionnel dudit lieu. Quelques-uns de ces enfants étaient nés trois ou quatre mois auparavant.
Toujours avec leurs fausses idées sur les moyens de pacification, les commissaires Gallois et Gensonné convoquèrent les cinquante-six municipalités qui composaient le district de Châtillon, afin d'aviser. Toutes émirent, avec une touchante unanimité, le voeu du retour des prêtres non assermentés. Nos gens attachaient un si grand prix à cette faveur que, pour l'obtenir, ils assurèrent être disposés à payer volontiers le double de leurs impositions, et cependant, ils étaient loin d'être riches. Or les commissaires ne voulurent pas, ou plutôt n'osèrent pas signaler à l'assemblée la vraie cause du mécontentement, ni proposer le seul remède, c'est-à-dire la liberté religieuse dont la Révolution malgré toutes ses phrases creuses et ses belles promesses, ne voulait à aucun prix. C'est à cette époque, en vertu de la loi du 5 juillet 1791, que la succursale de Tout-le-Monde fut, en principe, distraite de Saint-Hilaire pour être annexée à Maulévrier, mais ce n'était guère le moment propice pour exécuter ce transfert, et l'application de la dite loi n'était pas de sitôt sur le point de se faire.

Il est inutile de dire que depuis un certain temps déjà M. Roy était seul prêtre dans la paroisse. M. Robin avait dû s'acheminer vers l'exil ; il avait rejoint en Espagne, M. de la Richardière, vicaire générale de la Rochelle qui, avec plus de deux cents ecclésiastiques du même diocèse, avait reçu l'accueil le plus bienveillant de la part du cardinal de Tolède, au couvent de Saint-Dominique de Guadalajara. M. Roy disparut à son tour vers la fin de cette même année 1792, sans que j'aie pu savoir ce qu'il est devenu. Un des derniers actes de son ministère dans notre paroisse, est l'inhumation qu'il fit, le 12 mai 1792, de ma grand'tante maternelle, Françoise Fortune Devanne, autrefois religieuse converse à l'Union chrétienne de Fontenay, et qui avait été chassée de son couvent, était venue mourir au Vivier, à l'âge de 28 ans. Le 2 du mois d'août, M. Roy procède à la sépulture du corps de M. César Antoine Tocqué, ancien receveur d'impositions royales, et que nous avons vu à Châtillon se démettre de sa charge de Maire entre les mains des autorités républicaines. Il était mort à Aubert, le 31 juillet, à l'âge de 66 ans. A son enterrement figurent un brigadier de gendarmerie nationale et plusieurs de ses collègues qui signent avec le curé.

Au dire de M. de Béjarry, dans ses Souvenirs vendéens, page 41, un abbé Leroy vicaire des Echaubrognes serait mort, vers cette époque, d'une façon tragique : "Il avait, dit M. de Béjarry, refusé le serment et errait de maisons en maisons, continuant à administrer en cachette les sacrements aux braves gens de la paroisse. Il fut bientôt épié, et, en mai 1792, la ferme qui lui servait de refuge, ayant été inopinément cernée, il fut pris. Ses bourreaux l'emmenèrent en le maltraitant et l'insultant ; ils s'arrêtèrent d'abord à l'auberge, aux Echaubrognes, ne cessant pas leurs injures, ce qui apprit à tous les habitants l'iniquité commise, puis ils continuèrent leur route, redoublant de coups à chaque pas. En arrivant à Châtillon, le malheureux prêtre tomba de fatigue et de soif ; les soldats remplirent un verre avec du jus de fumier, et forcèrent l'abbé Leroy à avaler cet horrible breuvage. Enfin les misérables, las de se jouer de leur victime, la conduisirent hors de la ville, et l'achevèrent à coups de baïonnette. Les jeunes gens des Echaubrognes furent indignés en apprenant cette affreuse violence ; ils se rassemblèrent et résolurent de venger leur pauvre vicaire. Ils arrivèrent trop tard à Châtillon, et ne purent rejoindre sur la route de Bressuire que trois ou quatre des assassins.

Après tout ce que nous venons de dire, appuyé sur des pièces officielles, sur nos registres paroissiaux et sur la tradition, nous sommes, il semble, autorisé à affirmer que M. de Béjarry a été induit en erreur sur ce fait. (Voir à ce sujet l'excellent ouvrage publié en 1891. Un canton du Bocage vendéen, page 348). Les appréciations de l'auteur sont les nôtres : nous serions, certes, bien heureux cependant qu'il y eût un fond de vrai dans cette anecdote, car, il s'agissait ici de notre M. Roy, sa mort glorieuse prouverait qu'il se serait rétracté ; mais s'il en était ainsi, le lieu, la date de sa mort, en un mot, toute la mise en scène seraient de pure imagination).

"Il y a dans le caractère du Vendéen un instinct qui s'oppose aux bruyantes démonstrations ; aussi le verbiage pompeux des suppôts de la Révolution, des représentants du peuple, les mit tout d'abord en suspicion contre eux. Ils ont en outre une timidité qui les force à douter des autres, puis d'eux-mêmes ; enfin une espèce d'amour du bien-être et du repos qui retient et modère leurs élans. On massacrait leurs gentilshommes, on avait exilé leurs prêtres fidèles ; le 21 janvier on tua leur roi, la future Vendée militaire, devant toutes ces provocations, resta muette ; mais, le 11 mars 1793, à l'occasion du tirage au sort pour la levée de 300.000 hommes, le vase déborda, et la Vendée conçut spontanément la grande pensée de repousser la violence par la violence. Ce ne fut point des châteaux, ce fut des chaumières, que partit le signal de cette guerre juste et honorable aux yeux des hommes, sainte aux yeux de Dieu. Dans ce temps où l'on parlait tant de liberté, il n'y eut qu'un coin de terre où l'on mourut pour la défendre. Ce fut la Vendée." (Ledain)

Les habitants des Echaubrognes prirent une large part à cette lutte gigantesque ; leur position au centre du pays insurgé, l'ardeur de leur foi religieuse et politique, leur grand nombre, la vaillance des chefs sous le drapeau desquels ils se rangèrent, tout concourut à les mettre au premier rang parmi les intrépides défenseurs de la religion et du trône aussi l'histoire des guerres vendéennes est-elle, à vrai dire, la leur, et pas une affaire importante ne se passa sans eux, depuis ces premiers attroupements qui, dès le mois d'août 1792, donnaient déjà tant à penser aux commissaires du gouvernement Jard et Duchâtel, jusqu'à ce hardi coup de main du 17 mai 1815, qui a retenu le nom de grand choc des Echaubrognes.

Notre paroisse fournit à l'armée vendéennes deux officiers dont les noms sont glorieux, même à côté de ceux des La Rochejaquelein, des Cathelineau et des Bonchamps. C'est d'abord le brave Jean BOURASSEAU dont madame de la Rochejaquelein a immortalisé le nom et raconté le courage à la bataille de Torfou ; c'est Tonnelet de Tout-le-Monde, comme Stofflet, garde-chasse des Colbert-Maulévrier, et qui, dès les premiers jours de l'insurrection, partit de la Frogerie à la tête de 150 jeunes gens et se joignit à lui. "Tonnelet qui bientôt se fera de l'humilité de sa condition une arme pour combattre et vaincre les Bleus".

Tandis que la partie angevine des Échaubrognes se met sous la direction de Stofflet "le soldat aguerri, dont l'active rudesse exerce tant d'empire sur les paysans, et qui pauvre comme eux, a trouvé dans un dévouement sans bornes, le génie qui l'emportera au delà même du but qu'il veut atteindre". L'autre part, celle qui seule, depuis, a retenu ce nom d'Échaubrognes, va prendre pour chef celui en qui s'est personnifiée la grande lutte vendéenne.
"C'était, a-t-on dit mille fois, mais j'aime à le redire encore, un jeune homme de 21 ans, moins âgé que le vainqueur de Rocroi, mais non moins intrépide que lui ; M. Henri, car c'est sous ce nom d'amicale familiarité que le comte Henri de la Rochejaquelein est encore vénéré par les paysans dont il était l'idole, jusque-là n'était pourtant encore qu'un jeune homme à la taille élancée, à la figure noble et expressive, aux cheveux blonds, et qui, dès ce jour prit cet air martial et ce regard d'aigle qu'il ne quittera plus.
Toujours prêt à combattre, toujours faisant admirer à l'ennemi une témérité qui enflammait l'ardeur des soldats, et qui remportera en dix mois (13 avril 1793 - 29 janvier 1794) seize victoires sur les armées républicaines."
"C'est le 12 avril 1793, arrivé de la veille chez sa tante à la Durbelière de Saint-Aubin, après avoir été témoin d'une défaite qui avait fait reculer les insurgés jusqu'à Tiffauges, Henri, découragé, ne pensait pas qu'il y eût rien à faire pour arrêter la marche de la Révolution. Point de munitions, c'est à peine, si l'on avait deux livres de poudre ; plus d'espoir ; or c'est l'espoir qui dans ces sortes de guerres fait trouver tout le reste. L'armée elle-même est découragée et va se dissoudre ; l'insurrection vendéenne semble au moment d'être étouffée dans son berceau. Les revers se succèdent ; ce jour-là même les Bleus, c'est ainsi qu'on appelait les républicains, à cause de la couleur de leurs uniformes, sont sortit de Bressuire, sous la direction de Quétineau, et ils s'avancent vers Maulévrier pour opérer leur jonction avec un autre corps de républicains venant de Vezins et se dirigent sur Tiffauges. Les Vendéens cachés par un bouquet de bois de la commune de Saint-Hilaire des Échaubrognes, ont vu passer l'avant-garde et le corps d'armée du Quétineau. Ils croient devoir attaquer l'arrière-garde pour s'emparer des bagages. Quelques coups de fusils y jettent le désordre, tuent trois ou quatre républicains, et en blessent un plus grand nombre. Quétineau revient sur ses pas, use de représailles, repousse les assaillants, et entre aux Aubiers avec treize prisonniers."

Il ne faut pas cependant exagérer l'importance de cette prétendue défaite : Briquet (Histoire de Niort, p. 51) à qui j'ai emprunté ce récit, attribue vraisemblablement à tort l'avantage aux républicains. Si ces derniers avaient été victorieux, pourquoi ne continuèrent-ils pas leur marche au lieu de se replier sur les Aubiers ? Il prétend en outre que c'est M. Henri qui dirigeait ce coup de main : or ce n'est que le jour suivant qu'il se mit à la tête de l'insurrection (Voir Mme de la Rochejaquelein, Mémoires, 121).
Lorsque les paysans apprennent l'arrivée de M. Henri à la Durbelière, ils le viennent aussitôt supplier de se mettre à leur tête, l'assurant que cela ranimerait le pays et que le lendemain il aurait dix mille hommes, car ici, comme partout ailleurs, c'était l'armée qui venait frapper à la porte du général. Henri accepta leur proposition et crut à leur promesse : la nuit tint en effet la promesse de la veille.
"Les gars des Échaubrognes, de Saint-Aubin, des Cerqueux, d'Yzernay, de Nueil et des Aubiers se sont levés comme un seul homme : dix mille combattants se sont trouvés au rendez-vous. Le lendemain, le jeune homme gagnait la bataille des Aubiers et sans prendre une heure de repos, il courait toute la nuit avec ses volontaires, pour rejoindre Cathelineau et les autres chefs, et leur amener les canons et les munitions dont il s'était emparé. Les paroisses d'Anjou reprennent courage, l'armée se réforme, attaque les bleus, les bat sur tous les points, Cholet, Chemillé, Vihiers, tout le pays qu'on avait abandonné est repris ; tels sont les fruits de la première victoire de Henri de la Rochejaquelein.

Je n'entreprendrai point de suivre pas à pas nos braves habitants des Échaubrognes : resserré dans le cadre étroit d'une simple notice, je ne veux que rattacher à la grande épopée l'histoire de notre paroisse, et revendiquer pour ses habitants la noble part de gloire qui leur revient. Je vais donc continuer à glaner dans les divers auteurs les quelques passages où il est plus spécialement fait mention d'eux.

Nous avons laissé Tonnelet, le garde-chasse de la Frogerie, au moment où il vient d'amener à Stofflet les cent cinquante jeunes gens qui avaient, l'avant-veille, refusé de prendre part aux opérations du tirage. Ils l'encouragent tous à ne pas céder aux exigences de la Révolution. En agissant ainsi, ils ne faisaient que suivre l'impulsion donnée à toutes les paroisses, car au bruit des succès de Cathelineau, tous les jeunes gens de la banlieue de Cholet s'étaient mis sous les armes (12 mars 1793). Après la première bataille de Cholet qui eut lieu trois jours après, un détachement de soldats de la Rochejaquelein, à la tête desquels était Tonnelet, allait recevoir l'ordre de couper la retraite aux patriotes, en s'avançant sur leurs derrières jusqu'à Vezins ou Coron, et les prenant ainsi entre deux feux, mais le courrier qui devait les avertir de ce mouvement à prendre, s'enivra, chemin faisant, et n'arriva à Maulévrier, à destination, qu'après la déroute des républicains. Tonnelet ne voulut jamais, sans l'ordre de leur chef, permettre à ses soldats de sortir de Maulévrier. Le 22, Tonnelet et M. des Nouhes, le successeur de M. de Calais, pour commander la division des Aubiers, viennent de Maulévrier à Beaupréau, rejoindre le gros de l'armée, forte alors de 15000 hommes.
Au lendemain de la prise de Saumur, le 11 juin 1793, Tonnelet appose, comme officier de l'armée catholique, sa signature au bas du procès-verbal de l'élection de Cathelineau comme généralissime. L'abbé Deniau cite Tonnelet comme un des officiers qui se distinguèrent le plus par leur bravoure à la deuxième bataille de Cholet. Mais il est impossible de passer sous silence la grande part que prirent nos gens des Échaubrognes à la bataille de Torfou, l'un des plus brillants faits d'armes de l'armée vendéenne et qui se livra presque jour pour jour un mois avant (19 septembre - 17 octobre 1793).

La république, qui comprenait enfin que la grande partie était pour elle en Vendée, venait d'envoyer à Nantes un de ses meilleurs généraux, Kléber, qui à la tête de la redoutable garnison de Mayence, composée de 1400 hommes d'élite, venait rejoindre les troupes régulières de Beysser. Il avait avec lui deux officiers d'une grande distinction, Haxo et Beaupuy. Ce fut à Cholet que la grande armée vendéenne se réunit pour marcher à cette terrible lutte. Tous les chefs étaient présents, sauf La Rochejaquelein et Stofflet, retenus par de graves blessures. Lescure et Bonchamps y vinrent le bras en écharpe. Tous sentaient que le moment était arrivé de vaincre ou de périr. L'ennemi, de son côté, s'avançait de la ville de Clisson pour se porter sur Torfou. Les Mayençais s'emparèrent d'abord du village du Boussay ; ils s'avancèrent ensuite sur Torfou et emportèrent encore cette position, et ils rangèrent deux bataillons en avant du village. Au premier feu, les Vendéens, qui croyaient attaquer, se retrouvent attaqués eux-mêmes, furent déconcertés et faiblirent bientôt. L'armée de Charette surtout, découragée par ses précédents revers, ne tint pas, et lâcha pied. On était dans un de ces moments décisifs où se fixe le sort des batailles. L'armée entière était ébranlée. Si quelque incident ne rétablissait pas le combat, la déroute allait commencer. Lescure voit d'un coup d'oeil l'extrémité du péril. Il met pied à terre avec quelques-uns de ses officiers, et se tournant vers les soldats d'élite qui se pressaient derrière lui, il s'écrie avec cet accent qui fait pénétrer les paroles jusqu'au fond des coeurs : "Y a-t-il ici quatre cents hommes assez braves pour venir mourir avec moi ?" Les gens de la paroisse des Échaubrognes qui étaient ce jour-là, dix-sept cents sous les drapeaux, répondirent à grands cris : "Oui, monsieur le Marquis, nous vous suivrons partout où vous voudrez !" Ces dix-sept cents hommes, conduits par BOURASSEAU leur capitaine, étaient les meilleurs soldats de l'armée de Lescure, on les avait surnommés les "Grenadiers de la Vendée". Treize cents autres paysans se joignirent à eux. A la tête de ces 8 000 hommes, Lescure tint pendant deux heures l'effort de l'armée républicaine tout entière. Les autres généraux peuvent le rejoindre, après avoir rallié les fuyards. Les redoutables Mayençais sont à leur tour contraints de plier devant les Vendéens. Kléber a dit lui-même dans ses Mémoires, en parlant de ce combat. "Jamais on ne vit acharnement plus terrible." Cette journée coûta 2 800 hommes, six canons, deux obusiers aux républicains, étonnés "d'être vaincus par ces diables en sabots, qui se battent aussi bien et qui tirent beaucoup mieux qu'eux-mêmes". (Jeudi 19 septembre 1793). Dix-sept hommes de la paroisse des Échaubrognes succombèrent en cette journée, dit madame de la Rochejaquelein. Faut-il s'étonner après cela de l'attachement que Lescure témoigna en toutes circonstances aux braves qui l'avaient si vaillamment secondé ? Madame de la Rochejaquelein nous en cite une particularité bien touchante dans ses Mémoires : "Les évènements de la guerre, la mésintelligence des chefs, la situation de l'armée étaient pour lui (M. de Lescure) des motifs continuels de souffrance. Tout ce dont il s'occupait s'emparait fortement de son âme, et lui donnait une agitation extrême qui tenait même un peu de l'égarement et qui me pénétrait d'une frayeur affreuse. Toute la journée il parlait de la guerre, de ce qui s'était passé, de ce qui pouvait arriver ..."
"Un matin, le brave BOURASSEAU, des Échaubrognes, vint le voir, et lui raconta qu'avant le passage de la Loire, cette paroisse avait déjà perdu cinq cents hommes, tués ou blessés. Pendant ce jour-là, M. de Lescure ne nous entretint que du courage des gens des Échaubrognes, exaltant sans cesse leur héroïque dévouement. Je m'efforçais en vain de le calmer. Le soir la fièvre le prit et son état empira sensiblement. Je fis venir M. Desormeaux, très bon chirurgien, qui ne me quitta plus, car dans les premiers moments du passage de la Loire, il y avait un tel désordre, que pour lui procurer un chirurgien pour le panser, on était souvent obligé de battre la caisse".


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